Il y a 4 espèces de vipères en France (pour 10 espèces de couleuvres). La plus répandue est la Vipère aspic. Cette mignonette au délicat nez retroussé est surtout présente au sud de la Loire, qui est la ligne de démarcation entre l’aspic et sa cousine péliade.
Selon la légende, en 30 avant J.C., la célèbre Cléopâtre se serait suicidée avec un aspic, c’est-à-dire une Vipère aspic (Vipera aspis). Le mot « Aspic » vient du latin Aspis qui désigne les serpents venimeux en général. Ce serpent au nez notoirement retroussé ne vit pas en Égypte. Plus probablement, Cléopâtre VII s’est tuée en se laissant mordre par un Cobra égyptien (Naja haje) ou par une Vipère à cornes (Cerastes cerastes).
Une autre mort célèbre due aux vipères ? Ragnar Lodbrok, le célèbre héros viking, serait mort après s’être fait capturer par les Anglais. Ces derniers l’auraient jeté dans un puits rempli de serpents, sûrement de la cousine de l’aspic : la Vipère péliade (Vipera berus).
Les morsures de serpents sont considérées comme une maladie tropicale négligée. D’après les estimations de l’OMS, 5,4 millions de personnes sont mordues chaque année pour 2,7 millions d’envenimations. Environ 81 000 à 138 000 décès sont dus aux morsures de serpents. 3 fois plus d’amputations ou autres incapacités définitives sont dénombrées, principalement dues à des venins cytotoxiques provoquant des nécroses.
La Vipère aspic en France
Vipera, d’où provient le mot “vipère”, est une contraction de “vivipera”, qui fait référence à la viviparité. Dans ce mode de reproduction, il y a des échanges (nutriments, eau…) entre la mère et les petits. La femelle met au monde des petits déjà formés. Il s’oppose au mode ovipare, dans lequel la femelle pond des œufs, et au mode ovovivipare, où la femelle produit des œufs, mais les incube à l’intérieur du corps.
La Vipère aspic est la vipère la plus commune de France. Beaucoup pensent d‘ailleurs que c’est la seule vipère française, ses cousines (péliade, séoane, et orsini) étant bien moins répandues.
La Vipère aspic est relativement thermophile : elle apprécie la chaleur. Elle se retrouve donc dans le sud-ouest de l’Europe, du nord-est de l’Espagne jusqu’au nord-ouest de la Slovénie et de la Sicile jusqu’à l’extrême sud-ouest de l’Allemagne.
En France, elle est présente sur les deux tiers sud à l’exception de rares populations introduites par l’humain en Bretagne, en Normandie et en Alsace. Bien que thermophile, on la retrouve dans nos massifs montagneux jusqu’à 3000 m, sauf dans le Massif Central, où c’est la Vipère péliade qui prend sa place en altitude.
En France, c’est la Loire qui séparait grosso modo la Vipère aspic de la Vipère péliade. On retrouve principalement la Vipère péliade au-dessus de la Loire et la Vipère aspic se retrouve principalement en dessous. Mais cette dernière l’a dépassée maintenant et remonte petit à petit. Elle apprécie les haies bien exposées, les boisements et leurs lisières, les fourrés, les ronciers, les amas de pierres et tout un tas d’autres habitats.
La Vipère aspic est facilement reconnaissable à son museau retroussé, sa pupille fendue et son iris doré, ses petites écailles sur la tête et son corps trapu. En effet, la Vipère péliade quant à elle, a un iris rouge, un nez rond et trois grandes écailles sur la tête (en plus des petites).
Un des serpents les plus variables du monde
La Vipère aspic est une des espèces de serpents qui présente le plus de variantes, du point de vue des dessins et de la couleur, au monde. Dans ce cas, on parle de « polymorphisme » et de « morphe ». Un morphe désigne une forme ou une apparence anatomique ou morphologique, le morphe est une variation phénotypique de l’individu.
Beaucoup ont déjà entendu parler des vipères rouges qui seraient plus dangereuses que les grises ou inversement. Mais la Vipère aspic a bien plus de deux couleurs dans sa garde-robe ! Excluant les spécimens mélaniques, c’est-à-dire complètement noirs, la Vipère aspic peut donc arborer une multitude de couleurs et de dessins, de marquages.
À tel point qu’il y a eu jusqu’à 15 « variétés » différentes de décrites.
Après de nombreuses descriptions et l’arrivée de la génétique pour classer le vivant, 4 sous-espèces ont été retenues :
- Vipera aspis aspis;
- Vipera aspis zinnikeri;
- Vipera aspis francisciredi;
- Vipera aspis hugyi.
Les deux premières se retrouvent en France. V. aspis aspis possède un marquage constitué de barres ou de demi-barres transversales sur le dos.
Elle est présente sous une ligne joignant la Loire-Atlantique à la Moselle, hormis dans le sud-ouest et la Côte d’Azur.
V. aspis zinnikeri exhibe un zigzag continu sur le dos, pouvant rappeler la Couleuvre vipérine, et se rencontre dans le quart sud-ouest laissé par V. aspis aspis.
Cependant, les zones de contacts sont fréquentes et les motifs extrêmement variables.
La légende urbaine du lâcher de Vipère
La Vipère aspic, un « danger » ? Le venin est une arme dans le règne animal. Chez certaines espèces, comme la Vipère aspic, le venin est à la fois offensif et défensif. D’autres, comme le Cône géographique ou la Pieuvre à anneaux bleus, possèdent deux venins différents : un pour la défense et un pour la chasse.
Le venin est une substance précieuse. Elle met du temps à être produite et ne doit pas être gâchée. Pour la Vipère aspic, ce venin lui sert à envenimer les micro-mammifères dont elle se nourrit. Elle ne l’utilise qu’en dernier recours pour se défendre, préférant l’immobilité ou la fuite avant tout.
Les vipères, en France, ont pendant longtemps eu une protection limitée qui n’empêchait pas de les tuer en cas de danger (réel ou ressenti). Mais depuis janvier 2021, l’intégralité de nos vipères françaises ainsi que leurs habitats sont protégés. Malheureusement, cette protection arrive après des dizaines d’années de destruction de haies, murets et autres lieux de vie de la Vipère aspic.
À une époque, une rumeur évoquait des lâchers de vipères par des “écolos” en hélicoptère. L’objectif aurait été de faire remonter les populations de vipères. Cette légende fut tellement vivace qu’une thèse a été publiée à ce sujet. Les résultats sont multiples et parfois même farfelus. La création de cette légende pourrait venir de plusieurs idées ou rapprochements hâtifs : code d’opération militaire, technique d’alevinage des lacs de montagnes…
Un serpent dans votre jardin ? La peur vous envahit ? N’ayez crainte, les serpents font partie de la faune commune du jardin, au même titre que les hérissons ou les Mésanges bleues. Vous souhaitez savoir comment cohabiter, être rassurer ? Le SOS Serpent (liens ci-dessous) est là pour vous ! De nombreuses associations locales de protection de la nature développent ce réseau pour aider les particuliers à comprendre et dédiaboliser ces espèces. SOS Serpent, c’est l’appel pas la pelle !
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Liste des associations possédant un SOS Serpent/Médiation Faune Sauvage :
- Vienne Nature (86)
- Deux-Sèvres Nature Environnement (79)
- LPO Auvergne-Rhônes-Alpes (26/07; 69; 38; 63; 42; 01; 73; 74; 63/03/15/43) → https://auvergne-rhone-alpes.lpo.fr/sos-biodiversite/probleme-avec-un-animal/sos-serpents/
- Observatoire des Reptiles d’Auvergne (63)
- Cistude Nature (33; 21; 40) → 06.40.98.42.04 / https://www.cistude.org/index.php/accueil-sos-serpents
- Nature Midi-Pyrénées (31)
- Groupe Mammalogique et Herpétologique du Limousin (87) → 05.55.32.43.73
- Observatoire Batracho-Herpétologique Normand/CPIE de Normandie (50)
- Bretagne vivante (22; 29; 35; 56)
- LPO Franche-Comté (25; 39; 70; 90) → 03 81 50 43 10
- BUFO (67; 68)
- LPO PACA (04; 05; 06; 13; 83; 84) → 06 18 20 46 80 / 04 82 78 03 09
- AHPAM (04; 05; 06; 13; 83; 84) → 06 51 91 08 10
Pour écouter les épisodes sur les serpents du monde :
- https://bit.ly/serpents1_bases_BSG
- https://bit.ly/serpents2_crochets_BSG
- https://bit.ly/serpents3_esp_incr_BSG
- https://bit.ly/serpents4_esp_incr_BSG
Pour écouter les épisodes sur les tortues du monde :
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