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Le Poisson volant ou Exocet est un des rares habitants de l’océan à pouvoir rester en l’air plusieurs dizaines de secondes … entre le marteau et l’enclume, de Charybde en Scylla. La plupart du temps en effet, ces vols sont destinés à fuir ses prédateurs marins… pour malheureusement parfois mieux se jeter dans le bec des oiseaux.

Illustration de couverture par Laure Modesti, équipière de Baleine sous Gravillon

Exocet
Poisson volant commun (Exocoetus volitans)

Au large de l’île de la Réunion, la proue d’un bateau fend les flots, projetant des gouttes d’eau étincelantes dans toutes les directions. Des poissons, tout aussi brillants, sautent hors de l’eau pour s’écarter de la trajectoire du bateau. Ils déploient leurs nageoires pectorales, ils planent puis replongent en douceur dans le bleu profond de l’océan Indien. Ce ballet, mi-aérien mi-aquatique est celui de l’Exocet, plus connu sous le nom de Poisson volant.

En réalité, il n’y a pas un mais près de 70 Poissons volants. Toutes ces espèces font partie de la famille des Exocétidés. L’autre nom utilisé pour les désigner est l’Exocet, qui vient du grec exo signifiant “au dehors” et “koitê” “le lit, la maison”, qu’on retrouve d’ailleurs dans écologie et économie ! L’Exocet est donc le poisson “qui sort de son lit, de sa maison”. 

Exocet : Poisson volant ou planant ? 2 ou 4 ailes ?

Exocet avec 4 nageoires permettant de voler
Un modèle à quatre “ailes” du genre Cypselurus – Par Izuzuki – CC BY-SA 3.0

Hors de l’eau, les Poissons volants peuvent parcourir 30 à 50 m, et même dépasser les 100 m lorsque le vent est favorable, à la vitesse de 60 km/h.

Leur corps est fuselé, allongé, aussi bien hydrodynamique qu’aérodynamique. La plupart des espèces mesurent entre 30 et 45 cm de long à l’âge adulte. 

Il existe deux “modèles” de Poissons volants. Ceux avec deux “ailes”, comme le Poisson-volant commun (Exocoetus volitans), possèdent des nageoires pectorales longues et larges pour développer de la portance dans l’air.

Ceux avec quatre “ailes”, du genre Cypselurus, déploient en plus des nageoires pectorales, les nageoires pelviennes afin de planer. Dans les 2 cas, les nageoires ne peuvent pas battre comme les ailes d’un oiseau. Pour nager, ces deux “modèles” de poissons volants replient contre leur corps ces encombrantes voilures afin de ne pas être freinés dans l’eau. 

Exocet, poisson volant en plein vol

Les Poissons volants possèdent une nageoire caudale asymétrique (hétérocerque), avec le lobe inférieur plus long (hypocerque).

Lorsque le poisson est hors de l’eau, il peut se propulser en gardant ce lobe dans l’eau et en agitant sa queue. Il laisse alors un sillon en forme de zigzag à la surface.

Cette phase active fait dire à certains scientifiques que l’Exocet effectue un véritable vol propulsé. Lorsqu’il n’est plus en contact avec l’eau, alors l’animal plane car il n’y a pas de propulsion. En bref, volant ou planant, tout le monde n’est pas d’accord… 

Un ennemi évité, dix de rencontrés !

Les Poissons volants vivent dans les eaux chaudes de tous les océans du monde. Certaines espèces, comme le Poisson volant à ailes noires (Hirundichthys rondeletii) sont présentes en Méditerranée. La bouche tournée vers le haut, ils vivent près de la surface en se nourrissant dans le zooplancton. Ils sont planctonophages

Le ballet des Poissons volants évitant les Coryphènes dans l’eau et les Frégates dans les airs

Contrairement au Dauphin, lorsqu’il saute hors de l’eau, le Poisson volant ne le fait jamais pour s’amuser ! Ce comportement est une stratégie permettant d’échapper à un prédateur plus rapidement et en dépensant moins d’énergie.

Il est plus facile de se déplacer dans l’air que dans l’eau, les frottements sont moindres. De plus, franchir la surface permet de quitter le champ de vision des prédateurs, comme les Thons, les Espadons et ou les Daurades Coryphènes de cette vidéo.

Cependant, fuir les prédateurs marins ne les met pas à l’abri pour autant. Dans les airs, les Exocets deviennent les cibles des oiseaux marins, comme les Frégates ou les Goélands. 

Les Exocets finissent parfois leur vol sur le pont des bateaux. Dans le roman “L’histoire de Pi” de Yann Martel, ces “accidents” sauvent le jeune Pi. Dans le monde réel, ils sont peu visés par l’industrie de la pêche. Les œufs des Exocets sont recherchés au Japon pour la préparation de sushi et de sashimi. 

De la préhistoire à Avatar 2

Fossile de Thoracopterus magnificus présentant les mêmes caractéristiques que l'Exocet ou poisson volant actuel
Fossile de Thoracopterus magnificus (250 à 200 millions d’années) présentant les mêmes caractéristiques que les Exocets actuels – Par Ghedoghedo – CC BY-SA 4.0

Plusieurs poissons fossiles, comme Thoracopterus, présentent des caractéristiques communes avec les Exocétidés. Ils possèdent des nageoires pectorales hypertrophiées et une nageoire caudale hypocerque.

Par principe d’actualisme, cela laisse supposer que ces poissons du Trias (il y a 250 à 200 millions d’années) avaient un mode de vie identique à celui des Poissons volants actuels.

C’est une convergence évolutive. Deux groupes différents, sans lien de parenté direct mais soumis à un environnement similaire, obtiennent des caractéristiques communes au cours de l’évolution, comme la forme hydrodynamique des Poissons osseux, des Requins, des Cétacés et des Manchots. 

D’autres poissons sont qualifiés de volants mais ne quittent jamais le milieu aquatique, comme le Grondin volant ou la Rascasse volante.

Le Grondin, Dactylopterus volitans, doit son nom à ses immenses nageoires pectorales bordées de couleurs vives qu’il déploie pour intimider les prédateurs. Il donne alors l’impression de planer ou de voler… sous l’eau. C’est aussi cette dernière raison qui a donné son nom à l’invasive Rascasse Pterois volitans

Si le biomimétisme permet parfois des avancées scientifiques remarquables, le Poisson volant a inspiré une technologie militaire loin d’être pacifique… L’Exocet est aussi une arme, un missile français. Certaines versions peuvent être lancées depuis un sous-marin. Comme le poisson, le missile change de milieu pour filer au ras de l’eau et atteindre sa cible en évitant les radars. 

Plus poétique, dans “Avatar 2 : La voie de l’eau”, l’Exocet est la principale source d’inspiration pour le Tsurak ou Skimwing. Cette créature montée par les Na’vi vivants dans les atolls de Pandora, ressemble au croisement entre un poisson volant et un garpic alligator. Aquatique, elle peut planer tout en se propulsant avec sa queue hypocerque au contact de l’eau… comme nos Poissons volants bien terriens. 

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Pour écouter les épisodes de PPDP sur les Poissons volants :

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