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Petit et argenté, l’Anchois est le poisson le plus pêché au monde. Cette surpêche déséquilibre la chaîne alimentaire dont il fait partie, entraînant des répercussions sur l’écosystème. Quand il se fait rare, ses proies zooplanctoniques deviennent plus abondantes. Dans le même temps, les prédateurs de l’Anchois se raréfient.   

L'anchois
L’Anchois – Domaine public

Il est nommé “antxoa” au Pays Basque, “amarou” vers Nice et “amplovo” en Provence.  Le nom “anchois” provient du génois ”anciôa” qui signifie “petit poisson de mer”.  Comme tous les Engraulidae, l’Anchois a une fine bande argentée de chaque côté du corps. Une petite nageoire dorsale est présente au milieu du corps. La mâchoire supérieure dépasse largement la mâchoire inférieure.

Durant l’Antiquité, les Romains le connaissaient déjà, ils le transformaient en garum, une sauce proche du nuoc mam du Viêt-Nam.

Production d'Anchois par les femme au début du 20e siècle.
Préparation d’Anchois par Aka-rev-marcia – CC BY-SA

En France, l’Anchois en conserve est une spécialité de Collioure, un petit port des Pyrénées-Orientales, depuis que Louis XI, au 15e siècle, a exempté la ville de taxe sur le sel. L’Anchois commun, Engraulis encrasicolus, peut être préparé au sel, en saumure ou à l’huile afin d’être conservé. Ces recettes, vendues sous le nom Anchois de Collioures, ont permis à la ville d’obtenir le label européen IGP (Indication géographique protégée). La pêche traditionnelle (700 tonnes par an) a eu peu d’impact sur les populations méditerranéennes d’Anchois. Au début du 20e siècle, des millions de poissons s’approchaient des côtes pour frayer. Dans la deuxième moitié du 20e siècle, le développement des techniques de pêches industrielles a peu à peu détruit les populations méditerranéennes. Aujourd’hui, plus de 50% des Anchois de Collioure (appellation en conserve) sont des poissons importés d’Argentine. 

Anchois du Pérou : poisson le plus pêché au monde

Le poisson le plus pêché au monde est l’Anchois du Pérou, Engraulis ringens. Comme son nom l’indique, il vit au large du Pérou mais aussi du Chili, dans l’océan Pacifique. Dans cette zone, les eaux froides et riches en nutriments remontent des profondeurs, c’est le phénomène d’upwelling. Les nutriments entraînent une explosion de la quantité de phytoplancton, qui alimente à son tour le zooplancton. Celui-ci peut se multiplier en grand nombre et servir de nourriture à de très, très, … très nombreux Anchois. La bouche grande ouverte, chaque membre du banc filtre l’eau, un peu comme des millions de mini Requins-baleines de 15 cm de long. 

En 2018 au niveau mondial, sur 8,5 millions de tonnes d’anchois pêchés, 7,1 millions de tonnes sont des Anchois du Pérou. Et sur ce nombre, seulement 1 million de tonnes sont consommés par les humains. En effet, comme sa cousine l’Alose, ce poisson est peu apprécié, car il possède bien trop d’arêtes. Il est donc transformé en huile ou en farine afin de nourrir les  poissons d’élevage, comme le Saumon. 

L’Anchois, base de l’alimentation de nombreux prédateurs, comme les thons ou les oiseaux marins, est une sorte de “poisson fourrage”.

Mais, depuis plusieurs décennies, la surpêche des Anchois a engendré de nombreux problèmes économiques, sociaux et environnementaux.

La crise de l’anchois

L'anchois dans le Pacific
L’Anchois dans le Pacifique – Domaine public

Plutôt que de parler de “stock” de marchandises, l’océanographe François Sarano préfère parler de “population” d’êtres vivants. En Europe, les populations d’Anchois se sont effondrées à cause de la pêche industrielle. Et en 1960, on en pêchait 80.000 tonnes par an contre 10.000 tonnes dès 1980.  En plus de la pression de la pêche, les Anchois subissent les aléas climatiques. La combinaison des deux peut amener l’espèce au bord de l’extinction.
Au début des années 2000, les quantités d’Anchois pêchés dans le Golfe de Gascogne diminuent. Les scientifiques alertent et demandent une baisse du total autorisé de capture (TAC) pour 2003. Elles recommandent de prélever 12.500 tonnes. La Commission européenne ne suit pas ces recommandations et fixe un TAC de 33.000 tonnes. En 2005, alors que les populations d’Anchois dans le Golfe de Gascogne sont estimées à 15.000 tonnes, ce sont encore 33.000 tonnes qui peuvent être pêchées. Aberrant non ? 

Au cours de cette même année, la Commission européenne finit par fermer la pêcherie sous la pression des pêcheurs espagnols et au grand dam des français qui militent pour son maintien. Elle restera fermée de 2006 à 2010. Pendant ce temps, les populations se reconstituent. Les Anchois sont des poissons avec une courte espérance de vie, 4 ans, mais ils sont très prolifiques lorsque les conditions sont favorables. 

Depuis cette crise, les quotas sont fixés sur l’estimation du “stock” et tiennent compte des variations annuelles et naturelles des populations. Ces quotas pourraient ainsi éviter le risque de disparition de l’Anchois.

De plus, certaines études de l’Ifremer, toujours en cours, permettraient de mettre en place une pêche intelligente : pêcher en fonction de l’abondance de certaines espèces dans les milieux océaniques. Le développement de filets “intelligents” favoriserait la sélection des individus capturés en fonction de leur espèce et leur taille et cela directement dans l’eau, assurant la survie des espèces non ciblées. Grâce à cette méthode, plusieurs problèmes pourraient être résolus dont notamment les prises de dauphins qui finissent échoués  comme les 910 individus retrouvés sur les plages de France entre décembre 2022 et mars 2023.

En attendant, chacun peut réfléchir à sa consommation de poissons sauvages, mais aussi d’élevage… nourris aux Anchois. 

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Pour en savoir plus sur l’Anchois :

  • S02E27 NOMEN : Anchois 1
  • S02E31 NOMEN : Anchois 2 Impact et surpêche économique

Pour en savoir plus sur les animaux aquatiques :

Sources : 

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