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On connaît tous la Pieuvre, mais qu’en est-il du Nautile ou de l’Argonaute ? La classification des Céphalopodes est pleine de surprises et de tentacules !

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Illustration de la classification des Céphalopodes, de gauche à droite et de haut en bas : Seiche, Calmar, Poulpe, Nautile, Spirule, reconstitution d’Ammonite.

Dans la classification des Céphalopodes, je voudrais… le grand-père ! Bonne pioche, c’est le Nautile, le taxon le plus ancien parmi les Céphalopodes qui peuplent nos océans ! Si ce nom est aussi celui du sous-marin inventé par Jules Verne dans Vingt mille lieues sous les mers, on parle ici d’un animal qui appartient au vaste embranchement des Mollusques. Cet embranchement comprend de nombreuses espèces d’animaux marins et terrestres au corps dit “mou”, allant des Huîtres aux Limaces, en passant par les Poulpes et les Bigorneaux. Et c’est précisément à cet embranchement qu’appartient la classe des Céphalopodes, qui signifie “pieds sur la tête” d’après l’étymologie grecque.

Mais concrètement, quels animaux appartiennent à cette classe ? Il s’agit d’environ 800 espèces marines comme les Poulpes, Seiches ou encore les Calmars… qui ont de 8 à 90 bras accrochés à leur tête.

La classification des Céphalopodes sans se fouler un tentacule !

Il existe 3 sous-classes chez les Céphalopodes : deux toujours existantes, et l’une éteinte.

  • Les Nautiloïdes : communément appelés Nautiles, ils comprennent moins de 10 espèces. Ils ont une coquille enroulée et environ 90 bras.
  • Les Coléoïformes : ils n’ont pas de coquille externe permanente, mais au cours de l’évolution, ils ont internalisé une structure rigide, analogue à un os chez les vertébrés, de forme différente selon les espèces. Les Poulpes sont les seuls à avoir totalement perdu cette structure. Les Coléoïformes se répartissent en deux super-ordres : les Décapodiformes ayant 10 bras (Calmars, Seiches, Spirules) et les Octopodiformes à 8 bras (Poulpes, Argonautes…). 
  • Les Ammonites, classe éteinte aujourd’hui, elles avaient une coquille externe. Toutes les espèces ont disparu à l’extinction du Crétacé, en même temps que les grands Dinosaures, il y a environ 66 millions d’années.

Dans la classification des Céphalopodes, on distingue les Coléoïformes des Nautiloïdes par le nombre de leurs branchies. Les premiers en ont deux et sont dits “dibranchiaux” et les second en ont quatre, et sont nommés “tétrabranchiaux”. 

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Pieuvre dumbo, observée dans le Golfe du Mexique.

Les Céphalopodes sont connus pour l’utilisation d’un siphon, leur permettant notamment de se déplacer vers l’arrière par l’expulsion d’eau. C’est aussi à l’aide de cet organe qu’ils rejettent de l’encre, afin de faire diversion et fuir leurs prédateurs. Cette action leur demande beaucoup d’énergie : ils ne la réalisent que lorsqu’ils sont stressés. Par ailleurs, les Poulpes, que l’on appelle aussi Pieuvres, se déplacent également en “marchant” sur leurs bras, s’aidant du fond marin ou des rochers présents. Chez les Décapodiformes, deux des dix bras sont dits modifiés et ainsi appelés tentacules, ils peuvent être spécialisés pour la reproduction ou la chasse.

Saviez-vous que l’on trouve des Céphalopodes dans tous les océans et jusque dans des milieux extrêmes ? C’est le cas proche des volcans sous-marins, où on a observé l’espèce Vulcanoctopus hydrothermalis, ou encore dans les abysses. La Pieuvre dumbo (genre Grimpoteuthis) détient le record pour sa présence à 6957 mètres de profondeur. Elle doit ce surnom aux deux “nageoires” sur sa tête faisant penser à des oreilles d’éléphant.

Le mythe du Kraken mis à mal par un “bec de perroquet”

Classification des céphalopodes 
Sépion os de seiche calmar plume bec

Le Kraken de la mythologie Nordique et les récits de Calmars géants sont-ils pure fiction ? Ils seraient inspirés d’une espèce bien vivante de calmar, Architeuthis dux, pouvant atteindre 13 mètres de long et qui vit dans les profondeurs marines. Difficile à observer, on a tout de même des informations sur sa présence grâce à l’étude de contenus stomacaux de Cachalots. Ces Cétacés plongent très profondément pour se nourrir de ces grands calmars. Par conséquent, on retrouve dans leur estomac des “becs de calmar”, seule partie du corps de leurs proies qu’ils n’ont pas pu digérer. En effet, les Céphalopodes ont un bec rigide de la forme de celui d’un perroquet, qui est en fait leur bouche. 

Pour l’anecdote, si ce bec est présent chez tous les Céphalopodes, il est l’unique partie rigide du corps des Poulpes. Ce n’est pas le cas des autres représentants de cette classe. En effet,  la structure rigide interne des Calmars est la “plume” et celle des Seiches est le “sépion”. Les Spirules une petite coquille interne blanche et les Nautiles une grande coquille externe. D’ailleurs, le sépion est aussi connu sous le nom “d’os de seiche”, il est conseillé d’en donner aux oiseaux en cage comme source de calcium et minéraux.

Qu’ont en commun un arbre, un nautile et un poisson ? 

deux nautiles Palaos Nautilus Belauensis
Classification des Céphalopodes
Nautilus belauensis observés à Palaos, Océanie
© CC BY 4.0 Kai Squires

Ce sont des “fossiles vivants” ! Cette expression répandue sur internet n’a pas de sens, c’est l’expression espèces panchroniques qui est correcte. Elle désigne des espèces très proches morphologiquement d’espèces fossiles, qui ont traversé les temps géologiques mais qui ont évolué. Il y a 400 millions d’années, les espèces de Nautiles étaient nombreuses et diversifiées, il en aurait existé plus de 300. Tout comme le Coelacanthe, un grand poisson des profondeurs, ou le Ginkgo biloba, un arbre japonais, les Nautiles existaient au temps des Dinosaures. On a même cru que le groupe des Coelacanthes était éteint depuis des millions d’années… jusqu’à ce qu’un individu vivant soit pêché en 1938 ! Ces groupes ont survécu à la grande extinction de la biodiversité du Crétacé, mais au prix d’une perte de diversité. Aujourd’hui, moins de 10 espèces de Nautiles vivent réparties dans les océans Indien et Pacifique. 

Les Nautiles ont la particularité de se déplacer au milieu de la colonne d’eau, sans s’appuyer au fond comme le font les Poulpes. Ils peuvent remplir avec de l’air ou de l’eau des petites loges de leur coquille, modifiant ainsi leur flottaison. C’est par ce moyen qu’ils naviguent des zones profondes où ils vivent la journée jusqu’aux zones sous la surface, vers 200-300m de profondeur. Ils y passent la nuit et se nourrissent de crevettes, poissons et langoustes. Les seiches utilisent le même procédé, et ajustent leur flottaison à l’aide d’air capturé dans leur sépion.

Anecdote naturaliste, ou quand Georges Cuvier a cru découvrir une nouvelle espèce

argonaute céphalopode octopode Classification des Céphalopodes
Argonaute femelle dans sa nacelle – Céphalopode Octopodiforme de Méditerrannée © Thibault Delsahut

Au XIXe siècle, Georges Cuvier, influent scientifique français qui a réalisé de très importants travaux sur l’anatomie et les sciences naturelles, a travaillé sur la classification des Céphalopodes. En étudiant une femelle Argonaute – un Octopodiforme – il remarque fixé à son corps ce qu’il pense être un petit ver parasite. Il le nomme alors Hectocotylus pensant découvrir un nouveau taxon. Il s’agit en fait de l’organe reproducteur mâle, qui se détache entièrement de son porteur pour féconder les œufs de la femelle.

Aujourd’hui, “hectocotyle” désigne le bras portant les cellules reproductrices de Céphalopodes mâles, présent chez de nombreuses espèces autres que les Argonautes. En plus de cette spécificité d’un “hectocotyle” détachable, les Argonautes mâles et femelles se ressemblent peu. La femelle est 10 à 15 fois plus grande que le mâle qui, lui, mesure généralement moins de 2 cm : on parle de dimorphisme sexuel. Enfin, on appelle aussi les Argonautes par le nom “nautiles de papier” car les femelles construisent une coquille enroulée très fine appelée nacelle, pour y préserver leurs œufs. Cette coquille rappelle l’aspect des Nautiles.

À ne pas omettre : les travaux de G. Cuvier ont permis de grandes avancées naturalistes mais ont aussi porté sur l’anatomie humaine, prônant une hiérarchie entre des “races” humaines. Plus particulièrement lorsqu’il a disséqué Saartjie Baartman la “Vénus Hottentote”, femme africaine esclave qui a été exposée dans des foires et musées de son vivant. L’étude anatomique de cette femme, ancrée dans le contexte raciste du 19e siècle et essaie de prouver une infériorité de certaines ethnies. 

La classification des Céphalopodes est une porte d’entrée vers les surprises et spécificités passionnantes de ces espèces. C’est sans évoquer l’intelligence des Poulpes avec leurs 3 cœurs et 9 cerveaux ou les précieuses informations délivrées par l’étude des fossiles d’Ammonites… de nombreuses questions scientifiques perdurent.  

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Pour écouter les épisodes de Petit Poisson Deviendra Podcast sur les Céphalopodes :

  • S02E38 : Y’a un os… ou pas ? L’album de famille
  • S02E39 : Le Calmar… volant ! Si si ! ça existe !
  • S02E40 : La Seiche flamboyante, le top modèle de la famille
  • S02E41 : Le Vampire des abysses

Vous trouverez également ici 2 épisodes avec Marjorie Roscian, spécialiste des céphalopodes :

Sources :

Photos et illustrations :

  • Planche Classification des Céphalopodes : Seiche (Sepia vulgaris) © Scandinavian Fishing Year Book ; Calmar (Logio Vulgaris) et Poulpe (Eledone moschata) Giuseppe Jatta,1896 I Cefalopodi viventi nel Golfo di Napoli ; Nautile © CC BY-SA 3.0 Ekaterina Tutynina ; Spirule (Spirula australis) Ewald Rübsamen ; Ammonite par Heinrich Harder.
  • Pieuvre dumbo : NOAA Office of Ocean Exploration and Research, Exploration of the Gulf of Mexico 2014
  • Figure 3 : bec © Ariel Zych ; plumes photo de blog ; sépion CC-BY-2.0 tjabeljan sur Flickr.

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