Vous connaissiez sans doute la dendrologie, cette science qui repose sur l’identification des différentes espèces issues de la botanique des arbres — et plus généralement des végétaux dits « ligneux », ceux qui ont la consistance du bois, par opposition aux plantes herbacées bien plus tendres. Du grec dendron (arbre), khrónos (temps), et logos (parole, discours), la dendrochronologie est quant à elle une branche de la dendrologie, consistant à analyser les anneaux de croissance, les fameux « cernes », ces cercles concentriques annuels visibles à l’intérieur des troncs de nos amis les arbres.
À la croisée des sciences et de la magie, j’invoque la dendrochronologie !
Prélevez un échantillon de bois sous forme de carotte dans un tronc (acte indolore et sans conséquences pour l’arbre).
Appliquez-y les méthodes de la dendrochronologie, vous obtiendrez des marqueurs temporels très précis.
Et voilà, la pièce de bois ainsi déchiffrée aura notamment permis de définir l’âge de l’arbre dont elle est extraite.
L’arbre y a aussi imprimé des événements extérieurs l’ayant affecté au fil du temps, comme des phénomènes climatiques et environnementaux.
Un véritable « code-barres » climatique et autant d’éléments ainsi révélés lors de l’exploration de ses cernes !
Au XVIe siècle, Léonard de Vinci avait déjà décelé un lien entre la largeur des cernes et les variations climatiques.
C’est au XXe siècle que l’astronome américain Andrew Ellicott Douglass projeta scientifiquement la dendrochronologie après observation de l’influence du soleil sur les arbres.
De nos jours, cette science constitue un enseignement précieux en matière d’étude des arbres et de leur environnement.
La dendrochronologie absorbe en effet diverses interrogations quant au fonctionnement des écosystèmes forestiers.
Savoir lire entre les cernes
Outre la possibilité de dater la naissance d’un arbre, la dendrochronologie enseigne l’interprétation de l’ampleur des cernes.
Pourquoi certains sont-ils plus étroits que d’autres ?
Un stress hydrique dû à une forte sécheresse engendrera une croissance faible de l’arbre, y inscrivant des anneaux plutôt étroits.
A contrario, une année de fortes précipitations aura pour effet d’accroître le développement de l’arbre. La conséquence ? Des anneaux de croissance élargis !
Les cernes dévoilent ainsi au grand jour les conditions climatiques bravées par l’individu sur des centaines d’années. Et les retracent à qui sait les lire.
Une science au bénéfice de l’écologie
Imaginons ce que la dendrochronologie permettrait d’apprendre d’un Séquoia géant, lui qui a résisté plusieurs milliers d’années ?
Sans doute remonter aux temps préhistoriques en une seule mesure !
Dans un contexte d’intensification des contraintes climatiques, les menaces engendrées par ces aléas pèsent sur l’état de santé global de nos forêts.
Prenons la capacité de résilience des arbres, à savoir leur aptitude à retrouver une activité normale suite à une phase de fortes déstabilisations.
Celle-ci se mesure en pointant les périodes de crise dans la chronologie des cernes, puis en examinant le développement de leur croissance lors des années suivantes.
Il devient alors intéressant de questionner la faculté de certains arbres à se familiariser — ou non — avec des conditions environnementales nouvelles.
La gestion forestière revenant de fait à l’ordre du jour : quelles essences faudrait-il privilégier pour une meilleure adaptabilité des espèces face au réchauffement climatique ?
Toutefois, l’analyse des répercussions des changements climatiques sur la physiologie des arbres n’est pas si simple.
En cause, l’estimation des effets produits par ces changements, qu’il faut inscrire dans un temps long.
En effets, les perturbations en lien avec le climat ou des insectes peuvent avoir des impacts encore longtemps après l’événement.
Carbone 14 versus dendrochronologie
Sciences de la Terre, du Vivant, de l’Homme ou encore de la société : nombreux sont les domaines scientifiques qui adoptent la datation au carbone 14.
Les scientifiques l’utilisent comme « chronomètre » pour dater l’âge d’objets très variés, tels que les œuvres d’art, les roches ou les fossiles.
Rappelons que ce procédé permet de remonter le temps jusqu’à 50.000 ans environ (au-delà, la technique manque de précision).
Plus fine dans son interprétation – bien qu’essentiellement visuelle – que le carbone 14, la dendrochronologie est privilégiée comme mode de datation dès lors que la pièce de bois est assez “parlante” pour le faire.
Car contrairement aux arbres qui prospèrent sous les climats tempérés et boréaux, là où la saisonnalité impose aux arbres d’évoluer par cycles, toutes les espèces d’arbres ne développent pas des cernes de croissance annuels marqués.
En effet, les arbres tropicaux sont rarement pourvus de cernes ; leur croissance étant ininterrompue du fait de variations climatiques saisonnières peu perceptibles.
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Pour aller plus loin, l’épisode du podcast de Baleine sous Gravillon dédié aux arbres en général et au Garoé en particulier :
Et celui sur le rôle de l’écorce :
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