Requin-zèbre : le juvénile est Zèbre et l'adulte Léopard

Deux noms, deux “robes” pour une seule espèce. Bébé, le Requin-zèbre, naît rayé de noir et de blanc. En devenant adulte, les stries deviennent des tâches de Léopard.

Requin-zèbre juvénile - Illustration issue de la collection de l'Université d'Amsterdam (1700-1880) — *Requin-zèbre juvénile – Illustration issue de la collection de l’Université d’Amsterdam (1700-1880)*

Les jeunes sont tellement différents des adultes que les scientifiques les ont placés, pendant un temps, dans deux espèces différentes. Aujourd’hui encore, cette erreur laisse des traces puisque le nom scientifique est différent en fonction des bases de données (ITIS et FishBase). Dans ce cas, la règle dicte de conserver le premier nom donné. Le nom valide de cette espèce serait donc Stegostoma tigrinum, Stegostoma fasciatum est un synonyme. Pour le nom français, c’est le terme de Requin-zèbre qui est conservé. Le nom de Requin-léopard fait référence à une autre espèce : Triakis semifasciata.

Le Requin-zèbre peut atteindre 3,5 mètres de long, ce qui peut paraître un peu court comparé aux 18 mètres de son cousin le Requin-baleine. Ils possèdent une nageoire anale, deux dorsales et une bouche située très en avant des yeux ; ce sont tous deux des Orectolobiformes.

Un peu plus près… du fond

Illustration de Requin zèbre adulte — *Requin-zèbre adulte © Cyril Girard. Guide des Requins, Raies et Chimères des côtes françaises.*

Le lobe supérieur de sa queue est disproportionné (on parle de caudale hétérocerque par opposition à une caudale symétrique, homocerque). Chez le Requin-zèbre, elle sert uniquement à la locomotion. Elle n’a pas le rôle de fouet, comme chez le Requin-renard. L’absence de lobe inférieur s’explique par son mode de vie de “rase-moquette”. En effet, le Requin-zèbre reste posé sur le fond sableux la plus grande partie de son existence, il est benthique.

Le dessous de son corps est plat alors que son dos est “caréné” comme la coque d’un bateau. Cinq crêtes parcourent son dos. Elles permettent à l’eau de s’écouler sur le dos de l’animal et de le plaquer sur le fond. Le Requin-zèbre débusque ses proies dans le sable et dans les anfractuosités des rochers grâce à ses ampoules de Lorenzini, des organes sensoriels captant les champs électromagnétiques produits par les mollusques et les crustacés dont il se nourrit. Il les déloge grâce à la puissante force de succion de sa bouche.

Requin-zèbre, œil et spiracle — *Œil et spiracle – Par Jean-Lou Justine – CC BY-SA 3.0*

Alors que les requins de haute mer, comme le Grand requin blanc, doivent nager en permanence pour respirer, le Requin-zèbre peut le faire en restant immobile. Il possède la musculature suffisante pour pomper l’eau en direction de ses branchies et prélever tout le dioxygène nécessaire. Comme sa bouche est plaquée contre le sable, il respire par l’arrière des yeux… En effet, il possède un orifice, une arrivée d’eau, derrière chaque œil, le spiracle. Il mesure 1,5 cm de diamètre et conduit l’eau directement vers les branchies, sans passer par la bouche. Ce système de dérivation lui évite d’avaler un grain de sable de travers.

Requin-zèbre : plus rare que le Léopard

C’est une espèce peu connue, les études la concernant sont faites sur des individus présentés dans les aquariums ou pêchés “accidentellement”. Les spécimens déclarés et vendus sur les marchés asiatiques, en particulier en Thaïlande, permettent de déterminer les effectifs. Les signalements de cette espèce sont de plus en plus rares. Cela tend à montrer que les Requins-zèbres se raréfient, et justifie que l’espèce soit classée en danger d’extinction selon l’UICN.

*Requin-zèbre adulte – Par Sigmund – CC BY 2.0*

La chair du Requin-zèbre se consomme fraîche ou séchée et salée. L’huile issue de son foie sert de source de vitamines, un peu comme l’huile de foie de morue en Europe. Ensuite, les abats deviennent de la farine de poisson qui alimente… les poissons d’élevage.

Enfin, même s’il ne fait pas partie des espèces les plus recherchées pour cela, les pêcheurs prélèvent ses nageoires pour en faire de la soupe d’ailerons. Cet aliment est particulièrement prisé en Chine pour 2 raisons, c’est un fort marqueur social de richesse et de prestige et il aurait de prétendues vertus thérapeutiques. La soupe d’ailerons est servie lors des mariages ou du Nouvel An chinois. Ainsi, même sans être visé par les pêcheurs, le Requin-zèbre est victime des techniques de pêche non sélectives comme la senne démersale.

Plusieurs mesures permettent de lutter contre les menaces pesant sur le Requin-zèbre. Il bénéficie d’une protection totale en Malaisie mais les prises ne sont plus déclarées par peur des sanctions. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, les autorités ferment la pêche au chalut plusieurs mois par an. Enfin, en Australie, le Requin-zèbre profite de la protection d’une partie de son environnement, la Grande Barrière de Corail. D’après les études scientifiques, sa capacité à respirer en restant immobile permettrait un bon taux de survie après une prise accidentelle.

Nocturne, solitaire et discret, le Requin-zèbre reste une espèce mystérieuse sur bien des aspects. Des études récentes montrent, par exemple, que les femelles sont capables de se reproduire même en l’absence… de mâles.

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Pour continuer, la série Requins, avec Steven Surina, au grand complet en podcast :