Il y a un fort recouvrement de niche écologique entre les gorilles et les chimpanzés, c’est-à-dire qu’ils ont des besoins similaires en termes d’environnement et de nourriture. Les gorilles sont herbivores (végétaux uniquement) tandis que les chimpanzés sont omnivores (animaux et végétaux). Ils se retrouvent donc en compétition pour les fruits suivant la saison, mais le partage des ressources est généralement pacifique, avec des événements de « co-feeding », des gorilles et des chimpanzés se nourrissant sur le même arbre en même temps.
En 2019, pourtant, des scientifiques ont observé deux attaques de chimpanzés contre des gorilles au Gabon1 ! Les assaillants, principalement des mâles, ont attaqué lors d’une patrouille aux limites de leur territoire. Le mâle gorille, après avoir essayé de défendre son groupe, s’est retiré, submergé par le nombre d’attaquants (17). Les chimpanzés ont réussi lors de chacune de ces attaques à tuer un gorillon. Le corps de la première victime n’a pas été retrouvé et la seconde a été dévorée par les agresseurs.
Les infanticides sont courants par les carnivores car les petits sont plus faciles à tuer que les adultes. Dans le cas présent, les attaques ont eu lieu alors que la nourriture était rare mais la prédation ne semble pas être la cause des attaques. Les chimpanzés n’auraient pas mangé la première victime. Le corps n’ayant pas été retrouvé (comme dans la plupart des infanticides commis par les chimpanzés) l’hypothèse de la prédation ne peut pas être écartée.
Des attaques infanticides entre espèces (interspécifiques) de singes ont déjà été observées (Ateles hybridus-Alouatta seniculus2) mais jamais entre chimpanzés et gorilles. Entre groupes de chimpanzés (intraspécifiques), les infanticides peuvent être courants. Ils sont surtout commis par des mâles probablement à cause de la compétition sexuelle (accès aux femelles) mais ceci n’a pas encore pu être démontré3.
La cause des attaques de 2019 de chimpanzés sur des gorilles reste à découvrir !
Image de couverture : Fabrice Guérin – https://www.mynature.fr/
1Southern & al. , 2021, https://doi.org/10.1038/s41598-021-93829-x
2Rimbach & al., 2012, https://doi.org/10.1002/ajp.22052
3Lowe & al., 2019, https://doi.org/10.1007/s10329-019-00730-3
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