Imaginez une tortue sur laquelle on aurait roulé : une tortue « crêpe » toute aplatie… La plus grande jamais mesurée avoisinait les 2m pour plus de 100kg ! Cette tortue à la peau caoutchouteuse s’appelle Pelochelys cantorii, alias la tortue de Cantor.
«Une tortue géante à tête de crapaud et à la carapace molle et plate. Une espèce peu étudiée dont on sait peu de choses» prévient d’emblée Jérôme Maran, fondateur et président de l’association Le Refuge des Tortues à Bessières en Haute-Garonne.
Le zoologiste britannique John Edward Gray la décrit en 1864. Il choisit de la nommer ainsi en hommage au naturaliste danois Théodore Edward Cantor.
La tortue de Cantor appartient au genre Pelochelys qui s’est séparé des autres tortues il y a 40 millions d’années. Deux autres espèces, Pelochelys bibroni et Pelochelys signifera font aussi partie de ce genre.
La tortue de Cantor passe 95% de son temps sous la vase
Cette tortue d’eau douce et saumâtre (famille des Trionychidae) possède une morphologie particulière adaptée à son milieu de vie. “L’étymologie de son nom de genre, Pelochelys, vient du grec pêlos signifiant “argile”, “boue” en grec. Cette origine nous renseigne sur son habitat : la vase. La tortue de Cantor y demeure 95% du temps.“
Sa carapace plate et souple – la dossière (partie dorsale de la carapace) n’étant pas reliée au plastron (partie ventrale) par un pont osseux mais par du cartilage – lui permet de s’enfouir dans le fond des rivières, des fleuves et des lagunes pour se cacher des prédateurs et mais aussi pour chasser.”
Une redoutable prédatrice
La tortue de Cantor chasse à l’affût. Tapie immobile, ne laissant sortir de la vase ou du sable qu’une minuscule tête ronde, des petits yeux et un nez tubulaire très court, la tortue guette sa proie avant de “détendre son long cou et de la happer brusquement par aspiration”.
La tortue de Cantor se nourrit en majorité de poissons, de crustacés et d’amphibiens. Ainsi tout peut faire ventre avec elle, question d’opportunités.
Discrète et en voie d’extinction
Cette tortue est inféodée aux régions tempérées et tropicales (Amérique du Nord, Afrique, Europe, Moyen-Orient). Mais on la trouve plus particulièrement en Asie du Sud-Est.
“Les études scientifiques sur cette espèce discrète et difficile à observer sont rares” souligne Jérôme Maran. “On connaît très peu de choses sur sa vie et ses mœurs. Chassée encore de nos jours par toutes les populations locales pour sa chair et ses œufs, la tortue de Cantor est une espèce menacée, inscrite à l’annexe II de la CITES (Convention on International Trade in Endangered Species).”
Des programmes de sensibilisation et de sauvegarde ont ainsi été engagés auprès des populations et des pêcheurs locaux avec des signes encourageants puisque son effectif semble remonter au Cambodge.