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Photo de couverture: Antoine Charlier

« Mon chat ne chasse pas ou peu: il ramène rarement des proies. » Le leitmotiv des propriétaires est souvent le même, et démontre souvent un terrible aveuglement. Les apparences sont en effet trompeuses car les matous, même avec le gîte et le couvert, ne ramènent que 10 à 20% de leurs proies à la maison.

Les moineaux et autres oiseaux en fort déclin en France peuvent être victimes de baies vitrées, d’éoliennes, de tours, de voitures, de chasseurs, d’empoisonnements, mais aussi des chats. C’est lorsqu’il retourne à l’état sauvage qu’il est le plus meurtrier. Le pire impact concerne les oiseaux, bien davantage que celui des chasseurs. 

Parmi les chats domestiques, on distingue trois catégories: 

  • le chat de propriétaire : on estime cette population de chats bien nourris à 15 millions en France.
  • le chat errant (non stérilisé) / libre (stérilisé et relâché) : population estimée de 11 millions en France.
  • le chat haret : chat qui retourne à l’état sauvage et qui vit principalement de gibier, environ 5 millions en France. 

Notons qu’il est difficile d’avoir un recensement précis de toute la population de chats domestiques. 

Ces chats domestiques sont à distinguer du chat forestier ou chat sauvage qui n’a pas été introduit par l’humain, qui se nourrit à 90% de rongeurs et consomme toutes les proies attrapées.

Les causes du déclin des oiseaux

Le déclin des oiseaux n’est pas uniquement le fait de nos félins préférés ; les causes meurtrières se cumulent entre chasse, constructions d’habitations avec baies vitrées, éoliennes, chasse,… Néanmoins, selon différentes études et méthodes, un chat bien nourri peut capturer en moyenne 27 proies par an, contre 273 pour un chat errant et environ 1000 pour un chat haret. Par conséquent, les chats domestiques tuent environ 324 millions de petits animaux par an en France.

Photo : Antoine Charlier

Dans le monde, à ce jour, les chats sont impliqués dans l’extinction de 2 espèces de reptiles, 21 de mammifères et 40 espèces d’oiseaux.

À La Réunion, c’est le chat haret qui a été identifié comme étant une menace pour le pétrel de Barau, une espèce d’oiseaux marins en voie d’extinction. En Guadeloupe, il menace l’iguane des Petites Antilles, et en Polynésie française, les gallicolumba, des oiseaux de la famille des colombes.

L’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) a dressé une liste des 10 espèces invasives qui perturbent la biodiversité mondiale ; on y retrouve le chat, le rat et l’humain…

Le cas de l’Australie

L’Australie est probablement le pays où l’impact du chat domestique est le plus important et les solutions mises en place sont les plus extrêmes. Les îles sont les réservoirs d’une biodiversité souvent fragile car peu exposée aux prédateurs. Le taux d’endémisme y est en général très élevé. En Australie, près de 90% des espèces sont endémiques, c’est-à-dire qu’elles ne se trouvent nulle part ailleurs dans le monde ! Mais depuis son introduction à la fin du 18ème siècle par les colons, le chat serait une des causes principales de la disparition de 20 de ces espèces natives et en menacerait 100 autres d’extinction (numbats, chats marsupiaux, bandicoots, bilbies…).

Chaque année, 2 milliards de vertébrés seraient tués par les chats errants et 390 millions par les chats de propriétaires en Australie.

Pour pallier ce problème, le gouvernement australien a pris en 2015 la décision drastique d’éliminer 2 millions de chats errants avant 2020. En 2019, vous avez peut-être entendu parler de l’histoire des saucisses empoisonnées larguées un peu partout en Australie dans le but de tuer les chats errants. Les tirs et piégeages sont également autorisés pour éradiquer les chats errants. Certaines zones protégées ont été entourées d’immenses barrières anti-prédateurs. Concernant les chats de propriétaires, certaines régions ont mis en place un couvre-feu interdisant aux propriétaires de laisser leurs chats vagabonder la nuit.

Nécessaire ou immoral ? Quoi qu’il en soit, l’impact des chats sur la biodiversité, s’il n’est pas aussi extrême qu’en Australie, reste néanmoins bien réel chez nous et des solutions plus éthiques sont possibles. 

Les solutions

Pour éviter que votre petit tigre de salon ne s’attaque à la faune, il existe plusieurs solutions dont l’efficacité est prouvée !

Les essentielles, indispensables:

  • Stérilisez votre chat : essentiel pour limiter la prolifération des chats.
  • N’abandonnez surtout pas votre chat dans la nature : c’est dans ce cas qu’il va devenir un fléau pour la biodiversité du quotidien ! Si vous souhaitez vous séparer de votre animal, confiez-le à une nouvelle famille ou un refuge.  

Les solutions les plus efficaces restent celles qui limitent la présence du chat en extérieur. Si garder votre félin confiné peut être extrême quand il peut se promener dehors, vous pouvez établir un couvre-feu et rentrer votre chat pour la nuit et, au moins pendant les périodes à risque (nidification, envol des jeunes…). D’autres propriétaires préféreront la balade en laisse.

Ces solutions sont bénéfiques pour la petite faune, mais vous pouvez considérer qu’elles le sont également pour votre chat : moins de sortie permet inévitablement une baisse des accidents de la route, des bagarres avec des congénères et des maladies provenant d’autres animaux. 

D’autres solutions plus “light”, qui réduisent sa tendance à chasser, sans entraver sa liberté:

  • Jouez avec lui ! En y consacrant 5 à 10 minutes par jour, votre petit félin pourra exercer son instinct naturel de chasseur sans nuire à la faune. Une étude anglaise parue en 2021 a démontré que cette simple action permettait de réduire de 25% le nombre de proies ramenées !
  • Fournissez-lui une alimentation de bonne qualité qui répond à tous ses besoins. Cette même étude a également constaté une diminution de près de 40% des proies ramenées.
  • Vous pouvez utiliser un collier à clochette (controversé car pourrait provoquer des troubles de l’audition du chat) ou une bavette colorée (qui serait efficace pour éviter la prédation sur les oiseaux et ne perturberait pas le chat dans sa chasse aux rongeurs) mais, à ce jour, aucune étude n’a été menée pour mesurer les effets de l’une ou l’autre méthode.
  • D’autres solutions existent et de nombreux conseils sont prodigués pour la disposition des mangeoires à oiseaux. Des exemples ici : https://www.aujardin.info/fiches/comment-proteger-oiseaux-chats.php et https://www.ornithomedia.com/pratique/conseils/proteger-oiseaux-chats-00031/ 

Et pour les chats errants ? 

  • Demandez au maire de votre commune qu’il fasse capturer les chats errants (non identifiés) pour les faire stériliser puis les relâcher (cela est possible depuis 2015).
  • Nourrir ces chats libres.

Pour aller plus loin : 4 épisodes, avec l’invité Antoine Adam, écologue : S02 E56, E57, E58, E59.


Sources : 

Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères

LPO Anjou 

Le Mag du chat – Ouest France

5 Comments

  • Catherine dit :

    Un chat même stérilisé restera une nuisance écologique pour les 15 à 20 années que peut vivre un chat. A quoi j’ajoute les dégâts au jardin et bagarre la nuit à haut décibel. La stérilisation des chats et la participation active des mairies ne compense pas leur taux de reproductivité. Ce sont des actions de surfaces qui ne solutionnent pas le fond du problème.

    Une obligation de stérilisation devrait également être appliquée aux chats domestiques, ainsi qu’une obligation à garder son chat à la maison.

    Pourquoi autorise-t-on aux chat ce qu’on interdit aux chiens? L’adulation de certains propriétaires qui identifient leur animal de compagnie à un dieu égyptien; est sans doute en partie responsable de la tiédeur du débat. Il est temps de responsabiliser ce petit monde. L’Australie a un train d’avance à ce sujet.

    J’ai moi même une chatte stérilisée et maintenue à la maison. Elle est choyée. Mais je suis aussi une propriétaire RESPONSABLE. Mon attachement pour mon chat ne doit pas occulter ma responsabilité ni écologique , ni de bon voisin respectueux.

    • Marion Dangin dit :

      Bonjour Catherine,
      Merci pour votre commentaire. Vous avez effectivement raison : la perception des chats dans notre culture et notre société nous amène à ne pas prendre nos pleines responsabilités et il est ainsi difficile de trouver la solution qui ne serait pas polémique et qui soit la plus respectueuse de tous, y compris du chat.
      Si ce n’est pas déjà fait, nous vous invitons à écouter les épisodes sur le chat et tous les autres si le coeur vous en dit.
      Bonne journée

  • Marie dit :

    Félicitations, c’est un article super enrichissant ! J’ai déjà entendu parler plus d’une fois de l’impact du chat sur la biodiversité mais je dois dire qu’une piqure de rappel de temps à autre ne fait pas de mal.