Skip to main content

Un nom sautillant qui a l’air tout droit sorti d’un monde imaginaire. Et pourtant, l’Hippopotame défend bien sa place dans le Vivant. Incapable de sauter, de nager ou de faire du Hip Hop, cela ne veut pas dire qu’Hippopotamus amphibius ne nous surprend pas autrement ! Des mouvements d’oreilles à l’écholocation, attendez-vous à du spectacle. Ce colosse, aussi mortel qu’essentiel pour les écosystèmes d’Afrique, est de plus en plus rare.

© Oleg Chernyshov sur Flickr

Ces animaux passent la moitié de leur journée dans l’eau : la définition parfaite d’un animal amphibie, d’où lui vient son nom latin amphibius ! Ce n’est pas tout, l’Hippopotame peut plonger jusqu’à 5 minutes sans revenir à la surface. 

Imposant, cet herbivore se trouvait autrefois dans la basse vallée du Nil, et dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne (Bénin, Burkina Faso, République centrafricaine, Gabon, Guinée, Libéria, Mali, Niger, Sénégal et le Togo). Ces pays abritent de grandes rivières, l’habitat préféré de “l’Hippo”. Désormais, il fait partie de la liste rouge des espèces menacées au statut de vulnérable. Sa distribution ne cesse de diminuer pour se restreindre là où les rivières sont encore assez profondes pour se baigner.

Magicien des éléments 

Mangeurs d’algues et d’herbes, les os des Hippopotames amphibies sont trop lourds pour flotter ! Ils sont alors obligés de courir sous l’eau et donc de fréquenter les eaux peu profondes. Mais attention, sur terre, ils peuvent faire des sprints à 30 km/h, la même vitesse que celle d’un crocodile ou d’un mouton.

Piqueboeufs (Buphagus) mageurs de parasites. © Frank Metcalf sur Flikr

Ces animaux jouent un rôle crucial dans le transfert organique de l’herbe en nutriments dans l’eau, tout en permettant la dispersion des graines. Par exemple, les Hippopotames font passer d’importants apports de carbone organique dissous, d’azote et de phosphore des écosystèmes des prairies de savane vers les rivières d’Afrique subsaharienne. Ces grands mammifères offrent généreusement leurs parasites de peau ou de dents à des nettoyeurs. Dans l’eau pour certains poissons, ou sur terre comme aux oiseaux africains emblématiques des documentaires du genre Buphagus, les Piqueboeufs.

Brouteurs de grande surface

À la différence des Éléphants qui sont des herbivores sélectifs, c’est-à-dire qu’ils mangent certaines feuilles des arbres, les hippos sont des herbivores qui pâturent. Ils broutent tout sur leur passage, et sur de grandes surfaces. Les Éléphants et les Hippopotames ont donc des rôles bien distincts en Afrique. Ils ont également la méthode très originale de marquer leur territoire : lorsqu’ils font la grosse commission, leur queue s’agite en tournant comme un hélicoptère afin d’éparpiller au plus loin leurs fèces ! 

© OpenClipart Vectors sur Pixabay

Belle gueule tranchante

Hippopotamus amphibius, Parc national de Chobe au Botswana © Guillaume Lassalle

Les Hippopotames sont de gros molosses qui n’hésitent pas à se frotter aux Crocodiles. Ce n’est pas rare de voir un groupe d’Hippopotames venir les embêter rien que pour obtenir leur place sur les bancs de sable. Et ils ont de bonnes raisons d’avoir confiance, puisque l’Hippopotame est décrit comme l’animal le plus mortel d’Afrique, devant le Lion et le Crocodile du Nil. Il est la cause d’environ 500 décès par an. En restant dans les records, c’est le troisième plus gros mammifère après les Éléphants et les Rhinocéros. Un Hippopotame peut atteindre les  5 m de long et peser entre de 2 à 3,2 tonnes selon les sexes. Ces bulldozers sont très territoriaux. Les éthologues ont expliqué la signification des bâillements qui nous dévoilent  leur belle dentition : “tasse-toi de là, ou je te croque”. En une bouchée, l’Hippopotame peut couper un Crocodile en deux. Glouuuups.

Bébé Hippopotame

Bébé et jeune Hippopotame amphibie © Albert van der Schans sur Flikr

Mammifère terrestre, et pourtant amphibie, les petits Hippos naissent dans l’eau ! Les bébés se nourrissent de lait maternel rose. Il ne l’est pas à la sortie des mamelles, mais le devient en se mélangeant à la sueur luisante qui protège l’animal du soleil et de l’assèchement. Cette sueur sécrète deux acides, un rouge et l’autre orange, ce qui donne cette teinte rose ! 

Le bébé Hippo est suivi de près par sa mère car il est la proie des Hyènes, Lions et Crocodiles. Les mamans font partie des parents les plus protecteurs et dangereux du règne animal. On ne s’approche jamais d’un p’titipopo.

Cliques de vocalise

Une nouvelle étude scientifique a montré que les Hippopotames produisent des séries de cliques sous l’eau qui leur servent fort probablement à communiquer. Ces colosses vivent en groupe et suivent des comportements sociaux connus. Par exemple, ils font bouger frénétiquement leurs oreilles pour montrer qu’ils sont en confiance avec leurs congénères. Une sorte de check de gang à leur manière.

Une autre étude s’est intéressée à la transmission de la Covid-19 chez les Hippopotames. Certains d’entre eux auraient été infectés par le virus dans des zoos en étant en contact avec des humains eux-mêmes infectés. Ces individus n’ont toutefois pas eu de signe de maladie, ouf ! 

Invité gênant en Amérique du Sud

Un fait moins scientifique mais tout aussi triste : en Amérique du Sud, des Hippopotames se seraient échappés de chez Pablo Escobar en Colombie pour peupler les rivières. Aucun Hippopotame n’a jamais vécu en Amérique du Sud avant, puisque leur distribution se cantonne  à l’Afrique jusqu’à présent. N’étant pas natifs du pays, ils perturbent fortement l’habitat. Les quelques Hippopotames échappés à la base se sont reproduits, et forment désormais une colonie de plus de 150 individus. Cette invasion, due à une erreur humaine, vire au cauchemar pour la biodiversité colombienne et pour les habitants, au regard de l’agressivité et du danger qu’ils représentent. Les autorités colombiennes ont demandé à ce qu’une règlementation soit mise en plus afin d’éradicer de l’espèce qui affecte l’équilibre écologique. Les médias parlent d’une campagne de stérilisation, de transportation des individus en Inde ou au Mexique, ou bien une chasse contrôlée. Une chose est prouvée, n’essayez pas d’apprivoiser un Hippopotame comme animal de compagnie, il va vous échapper à coup sûr !

© Rama Wang sur Flikr

_______

Pour écouter l’épisode de NOMEN sur les deux espèces d’Hippopotames :

  • NOMEN S04E01 – L’Hippopotame, le rageux du marigot 1/2
  • NOMEN S04E05 – L’Hippopotame, des salutations protocolaires très merdiques 2/2

Pour aller plus loin dans vos lectures :

  • Thomas E Lacher, Ana D Davidson, Theodore H Fleming, Emma P Gómez-Ruiz, Gary F McCracken, Norman Owen-Smith, Carlos A Peres, Stephen B Vander Wall, The functional roles of mammals in ecosystems, Journal of Mammalogy, Volume 100, Issue 3, 23 May 2019, Pages 942–964, https://doi.org/10.1093/jmammal/gyy183
  • Maust-Mohl, M., Soltis, J., & Reiss, D. (2018). Underwater click train production by the hippopotamus (Hippopotamus amphibius) suggests an echo-ranging function. Behaviour, 155(2-3), 231-251. https://doi.org/10.1163/1568539X-00003484

_______